• Les lionnes de Venise, tome 1

    Auteur : Mireille Calmel
    Éditeur : XO
    Année de parution : 2017
    Format : ebook
    Genre : historique
    Nombre de pages (en édition papier) : 346

    Lucia, jeune et espiègle Vénitienne, se retrouve au milieu des flammes qui dévastent la modeste imprimerie familiale. Sous ses yeux, son père est enlevé par trois hommes armés. Qui donc se cache derrière ce crime ? La veille, la magnifique Isabella Rosselli, la plus rouée des espionnes de la cité des Doges, est venue faire reproduire une étrange gravure. Lucia est décidée à percer cette énigme et à sauver son père. Dans une quête effrénée, elle s'immisce parmi les puissants, se mêle au bal des faux-semblants du carnaval, s'enfonce dans les arrière-cours des palais. Une Venise fascinante, oppressante, où le pouvoir se confond avec l'amour, où les étreintes succèdent aux duels et les baisers aux complots. Dans ces bas-fonds de la cité lacustre, amis et ennemis avancent masqués. Lucia joue de ses charmes, de son épée, de son poignard aussi qu'elle porte au mollet. Elle ruse, croise le fer avec Giorgio Cornaro, le fils du doge, homme corrompu et dangereux, prête à tout pour découvrir la vérité sur cette gravure dont tous, à Venise, sont convaincus qu'elle recèle le secret du pouvoir absolu.

    Je n'avais pas lu d'ouvrages de Mireille Calmel depuis "Le bal des Louves" et "Le lit d'Aliénor" il n'y a pas loin de dix ans. La sortie de cette nouvelle saga était un bon prétexte pour s'y remettre.
    L'aventure se déroule en Italie, pays dont je connais très peu de choses tant sur le plan géographique qu'historique (exception faite des Borgia et des Médicis). Il y a peu de descriptions et pourtant on parvient à se représenter le décor : les canaux, les berges, les bâtiments, etc. On sent qu'un travail de recherche très approfondi a été fait concernant la vie des Italiens, les objets du quotidien, les armes, les techniques des artisans, etc.

    L'aventure de Lucia commence dès les premières pages et n'aura aucun temps mort. Un climat de suspicion s'installe vite, Lucia se faisant assez rapidement bernée, autant que le lecteur. A qui faire confiance? De qui se méfier? Mireille Calmel se plait dans les aventures emplies de pactes et de trahisons, et cela se sent. J'aurais malgré tout aimé qu'elle s'attarde d'avantage sur les motivations de chacun car je me suis retrouvée plusieurs fois perdue. Il y a une foule de personnages et comprendre qui s'est allié avec qui et pourquoi est souvent compliqué. 
    Le personnage de Lucia me pose de gros soucis; sa transformation instantanée de simple fille d'imprimeur à courtisane en quelques jours seulement est peu crédible, ainsi que ses prouesses à l'épée (je ne suis pas sûre que la détermination suffise à décupler ses talents à ce point-là et en si peu de temps). De plus, malgré la mort qui frappe et les malheurs qui l'assaillent, elle reste égale, presque détachée. Cependant, son compagnon de voyage (dont je tairai le nom pour ne pas spoiler) a le profil type du sauveur courageux et charismatique, et j'avoue ne pas y être restée indifférente... Enfin, j'ai refermé le livre en me posant beaucoup de questions sur Isabella que j'aurais aimé voir d'avantage en action.
    Pour un roman "de capes et d'épées", j'ai trouvé les scènes de duels très courtes et pas très attractives. Les coups fourrés dans lesquels se mettent les héros sont également trop facilement résolus à mon goût. De manière générale, tout va beaucoup trop vite dans cette histoire. Le point fort des textes de Mireille Calmel reste définitivement les scènes de séduction, malheureusement peu présentes dans cette saga.
    Je ressors de cette lecture un peu mitigée. J'en attendais peut-être trop...

     

    Note

     

           Quatre jours. Giorgio Cornaro lui avait donné quatre jours pour devenir une autre. Mais c'était cette femme privée de regard qui avait finalement transformé Lucia.[...]
           - Je n'échouerai pas, lui avait assuré Lucia.
           Elle avait pourtant été incapable de dormir, hantée par ces orbites creuses, cette maigreur squelettique. Et soudain, le visage de son père s'y était superposé. Elle s'était redressée sur sa couche infâme, le souffle court. [...]
           Elle avait découvert la morsure de la torture sous le fouet de l'abbesse, en avait mesuré l'horreur devant l'agression qui avait amené cette nonne à la cécité.
           Mais pour la première fois, alors que la mi-nuit de ce 25 octobre n'avait pas tourné, il lui sembla ressentir en sa propre chair la brûlure d'un fer rougi à blanc, la tenaille d'une pince, la déchirure d'un écarteur.
           Papa...
           Cette peur, ce sentiment omniprésent d'urgence, que Giorgio l'avait contrainte à dompter, la submergea tant qu'elle se jeta contre la porte, secoua la serrure, appela. En vain. Elle se laissa couler derrière, glacée comme au jour de son arrivée. Jusqu'à ce qu'une lucidité implacable s'empare d'elle.

           Elle redevint celle qui, pour survivre un an plus tôt, avait percé le cœur d'un voleur dans une des ruelles proches du campo. La seule capable de délivrer son père avant qu'il ne succombe sous le joug d'un bourreau.

           Le petit jour la trouva plus résolue encore.
           Si bien qu'une fois l'office de none achevé, Lelio Andreini se planta devant elle, les mains jointes et le visage enguirlandé.
           - Je n'aurais jamais cru pouvoir le dire. Vous êtes prête, Lucia.


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  • Les beaux étés, tome 3

    Scénario : Zidrou
    Dessin : Jordi Lafebre
    Éditeur : Dargaud
    Année de parution : 2017
    Genre : adulte
    Nombre de pages : 56

    1992, les années ont passé, le jeune couple est maintenant à la retraite, la petite Pépète est devenue une jeune fille et la 4L est à vendre... L'occasion de se remémorer l'année 1962, leurs toutes premières vacances à son bord en compagnie... des beaux-parents. Les vacances avec Yvette-la-parfaite et Gros-Papy seront plus gastronomiques que bucoliques... en direction de Saint-Étienne !

    Que j'aime cette série! C'est émouvant, c'est nostalgique, c'est drôle... D'ailleurs, plus on avance, plus les tomes gagnent en humour. Je me demande déjà ce que cela donnera dans le prochain.

    Comme dit dans le résumé, le début de la BD présente une courte scène se déroulant en 1992, quand le couple vend la 4L; la 4L avec laquelle ils sont allés en vacances... en 1962! Pour ceux qui ont lus les anciens tomes, on est 7 ans avant le tome 2. Il n'y a pour l'instant que deux enfants dans la famille belge, le père, Pierre, s'imagine déjà devenir un grand dessinateur de BD, et déjà à cette époque il retardait le jour de départ en vacances pour finir un projet professionnel. Quand ils peuvent enfin partir, on découvre qu'ils emmènent aussi les parents de Madame : Yvette et son guide Michelin (qui forment un tout), et son mari ventripotent et surprotégé depuis qu'il a fait une attaque. Cela va finir par devenir, non pas des vacances en famille, mais les vacances d'Yvette qui va avoir le dernier mot pour choisir le trajet, la destination et où dormir et manger.
    Je n'ai pas trop envie de vous gâcher la surprise de la suite mais c'est à mourir de rire! J'ai tout particulièrement aimé les scènes au restaurant et les répliques de belle-maman (avec son guide Michelin!).
    Je vais me répéter, mais cette BD est un vrai bonheur à lire! Je n'étais pas née en 1962 mais je ressens tout de même le côté rétro dans le dessin : les vêtements, les aménagements, les voitures, etc; et dans chaque tome, il y a toujours un personnage pour fredonner la chanson à la mode cette année-là.
    Les couleurs sont pétillantes, les traits des personnages reflètent complètement leur personnalité et ils sont tous très expressifs.
    Une série qui sent bon les vacances et les galères bons moments en famille, et qui rappellera des souvenirs à certains. Si vous êtes belge, vous aimerez encore plus!

     

    Note

    Les beaux étés, tome 3

     (cliquer sur l'image pour voir en grand)


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  • Lumière, le voyage de Svetlana

    Auteur : Carole Trébor
    Éditeur : Rageot
    Année de parution  : 2016
    Format : broché
    Genre : historique, fantastique
    Nombre de pages : 384

    Entre raison et passion, ombre et lumière, le destin captivant de Svetlana.

    Hantée par la dernière volonté de sa mère adoptive, Svetlana quitte le Paris des Lumières pour rejoindre la Russie des tsars. Au cours de ce voyage, elle rencontre des êtres mystérieux, Varlaam et Mira, et se découvre d'étonnants pouvoirs...
    Pour accepter sa véritable identité, Svetlana doit affronter sa part d'ombre. Et qui, de Boris l'officier d'élite, ou d'Aliocha, le paysan rebelle, l'aidera à se révéler à elle-même?

    Carole Trébor nous offre une histoire des plus originales dans le monde de la littérature pour adolescents; un roman historique se déroulant à l'époque des Lumières et dont l'héroïne n'appartient pas à l'aristocratie. De plus, on sort des frontières françaises. C'est très plaisant de découvrir d'autres décors et la culture russe rarement abordée par les auteurs francophones.

    La première partie du roman est très plaisante. Le narrateur nous décrit une ville sale et puante, fidèle au Paris de l'époque. Au milieu de la fiction, il y a beaucoup de références à des éléments historiques réels : le père de Svetlana a participé à l'élaboration de la fameuse Encyclopédie, Denis Diderot a un rôle secondaire (un ravissement pour moi qui avait adoré Jacques le fataliste)... On est complètement plongé dans cette époque où les Arts et la connaissance avaient une place si importante.
    Suite à la lecture d'un courrier de sa défunte mère adoptive, Svetlana va donc entreprendre un voyage dangereux vers la Russie. A partir de là, il est également fait référence à plusieurs éléments et personnages réels (que je ne connaissais pas, cette fois); il n'est pas nécessaire de savoir de quoi il retourne pour suivre l'histoire de Svetlana, mais pour les plus curieux, un index explicatif est présent à la fin du roman. J'aime beaucoup m'instruire en lisant une fiction, et c'est vraiment le gros plus de celle-ci!
    J'ai beaucoup aimé le personnage de Guy (le voisin de Svetlana) et Varlaam et Mira forment un couple intrigant et attachant. Svetlana est une héroïne cultivée et courageuse qu'on prend plaisir à suivre dans sa quête.J'ai moins apprécié Aliocha qui ne semble pas avoir de personnalité profonde : il exécute les demandes de Svetlana sans protester, il se précipite dans chaque bataille qui se présente, etc; un personnage qui m'a peu intéressée. J'étais cependant impatiente de voir Catherine II entrer en scène, et j'ai été déçue qu'elle soit si peu importante dans la quête de Svetlana. Dommage également que la vérité concernant Boris se devine à des kilomètres...
    Je dois aussi avouer que je n'ai pas été conquise par le côté fantastique de l'histoire. Toute la complexité et les dangers que la magie engendre sont résolus trop facilement. Ceci se fait cruellement sentir dans les vingt dernières pages qui concentrent toute la résolution de l'intrigue à elles seules. Je conçois que le voyage de Svetlana a tout de même été rude (conditions climatiques difficiles, impasses, courses poursuites, etc) mais cette fin est vraiment trop expéditive et certains détails sont même absurdes (faire garder la geôle d'un personnage doté de pouvoirs magiques et accusé de trahison envers l'empire par une petite poignée de soldats, par exemple).

    En conclusion, Lumière est un roman en demi-teinte. Laissez-vous néanmoins tenter si vous êtes adepte de bons romans historiques.

     

    Note

     

           La nuit tombe déjà. Aliocha me rejoint dans l'habitacle, les bruits nocturnes s'élèvent peu à peu, il tend l'oreille, aux aguets.
         - Va y avoir une tempête bientôt, me prévient-il, les sourcils froncés.
         - Pourquoi tu dis ça?
         - T'as pas entendu le hululement d'la chouette?
         - Non...
         - Elle m'a averti. Les chouettes, elles sont les messagères des dieux des vents, affirme-t-il avec le plus grand sérieux.
           Ces oiseaux pourraient le prévenir d'une tempête grâce aux modulations particulières de leurs hululements? Cela me laisse sceptique...
         - Qu'est-ce que c'est que ces superstitions? Tu crois vraiment à ce que tu dis?
         - J'le connais pas ce mot, superstition, ça veut dire quoi?
       - Une superstition, c'est une croyance qui n'est pas fondée sur des faits prouvés. Ni sur un raisonnement... Ni sur une expérience.
         - Et alors? Tu crois peut-être que j'invente? Ce que j'te dis, ça vient toujours de ce que je vis, en vrai!
           Je ne rétorque rien, sa protestation est légitime, ses prédictions se sont déjà révélées exactes et j'ai bien du mal à l'accepter et à le comprendre. Peut-être ces présages ne sont-ils pas vraiment des superstitions, mais relèvent-ils plutôt de sa connaissance expérimentale de la nature qu'il déchiffre comme je déchiffre mes livres? Chaque arbre raconte une histoire, m'a-t-il dit il y a quelques jours. La forêt est pour lui une immense bibliothèque emplie de recueils de contes, de poèmes, d'ouvrages de philosophie et de sciences.


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  • Passé simple

     

    Auteur : Olivier Descosse
    Éditeur : Pygmalion
    Année de parution : 2017
    Format : broché
    Genre/thématiques : séparation, reconstruction
    Nombre de pages : 275

                        "Je lis.
                        Mon cerveau n'imprime rien.
                        Je te quitte.
                        C'est tout ce que je comprends."

     

    Après la culpabilité, le vide abyssal de la séparation.
    Comment se reconstruire? Comment tourner la page quand s'entremêlent douleur, colère et espoir de la voir revenir?
    Pour envisager un avenir, Vincent devra creuser son passé. La vérité s'y cache, enfouis sous les décombres de ses dénis.

    Merci à Babelio et aux éditions Pygmalion pour m'avoir envoyé cet ouvrage dans le cadre de la Masse Critique.

    Vincent est un psychothérapeute de quarante ans qui vient d'être quitté brutalement par la femme qui partageait sa vie depuis plus de deux ans : Marianne. En parallèle des conséquences de cette rupture, le narrateur nous raconte également sa rupture précédente : c'était avec Virginie, la mère de sa fille. Les deux femmes sont différentes, les sentiments sont différents, la police d'écriture est différente. Ces deux événements de la vie de Vincent n'ont clairement rien à voir. On n'est jamais perdu dans ces sauts dans le temps répétitifs car la narration est claire et maîtrisée. Vincent ne les aborde pas du tout de la même façon.
    La peine de Vincent suite au départ de Marianne ne fait aucun doute. On réalise grâce aux flash-back que le début de leur idylle a été aussi rapide que passionnel. En tant que psychothérapeute, Vincent tient absolument à mettre des mots sur sa douleur; il cherche où il a fauté, pourquoi cette rupture le mine tant et comment se relever.

    Ce que j'ai aimé dans cette lecture, c'est qu'il prouve que ce sont les cordonniers les plus mal chaussés : ce n'est pas parce qu'on est un professionnel de la psychologie qu'on échappe aux émotions négatives et qu'on comprend tout ce qu'il se passe dans notre vie. Avec Virginie, c'était lui le dominant du couple : il n'avait aucun sentiment pour elle. Dans sa relation avec Marianne, c'est clairement elle qui mène la danse. Ce qui est paradoxal, c'est qu'on ne sent pas non plus de sentiment amoureux naître entre eux deux; de la passion oui, mais en aucun cas de l'amour. Ils se jettent tellement vite dans les bras l'un de l'autre que c'est à se demander si ce n'est pas un moyen pour chacun d'échapper à une certaine solitude. Et maintenant, Vincent est de nouveau seul...
    J'aime beaucoup Léa, la fille de Vincent, qui n'est pas aussi naïve et innocente que le croit son père. Marianne, au contraire, me répugne. Il m'est arrivé d'avoir des frissons en lisant des passages sur elle et ses attitudes.
    Concernant l'écriture, j'ai été gênée par les nombreuses phrases nominales courtes qui donne un côté trop saccadé au texte. L'écriture aurait pu être plus fluide.
    Malgré le sujet de la rupture qui est au centre du livre, je trouve que c'est un roman très positif car Vincent assume sa tristesse et cherche immédiatement à s'en sortir. Il est très lucide sur son état mélancolique. C'est un roman qui fait du bien et qui prouve qu'on peut toujours se relever.

     

    Note

          La bête a repris possession de mon corps.
           Elle me cloue au lit.
           J'ai dû demander à ma secrétaire d'annuler mes rendez-vous. Mes patients attendront. Ils rament depuis des mois sur leurs problématiques, une séance en plus ou en moins ne changera pas la donne.
           Je regarde le plafond depuis vingt minutes. Plus de sève, plus de jus, plus d'envie. Cette fois, j'y suis. Je vais de plus en plus mal et le temps n'arrange rien.
           Deux mois que Marianne m'a planté.
           Pas un coup de fil, pas une lettre.
           Rien.
          Je ne l'ai pas relancée non plus. Je m'imagine mal me traîner à ses pieds, la supplier de revenir. Si elle me reprenait par pitié, ça nous mènerait où?
           Il va pourtant falloir que je réagisse. Je connais les signaux d'alarme de la dépression. Je les ai tous. Plus d'appétit, plus de désir, une fatigue constante et un ennui insondable.
           Pour ce qui est de l'ennui, je suis déjà prédisposé. Il me poursuit depuis l'enfance. Toute ma jeunesse, j'ai essayé de le combattre. En vain. Le monde me surprend très rarement et m'enthousiasme encore moins. D'après le pédopsy qui m'avait évalué à l'époque, je suis un surdoué contrarié.
           En clair, un branleur avec des facilités et une grosse lucidité sur les gens et les choses.


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